Podcast #1 « Des mondes à construire » : l’hydrogène et ses caractéristiques

Pour inaugurer cette première saison du podcast "Des mondes à construire", nous avons invité Nicolas Dattez, spécialiste hydrogène chez Leonard et VINCI Energies. Grâce à lui, vous découvrirez, en moins de 10 minutes, les caractéristiques de ce vecteur d'énergie qui, aujourd'hui, fait tant parler de lui !

Bonjour, vous écoutez Des mondes à construire, le podcast de Leonard pour mieux comprendre les transformations des villes et des territoires, l’avenir des métiers de la construction, des mobilités et de l’énergie.

Cette saison, nous nous penchons sur l’hydrogène. Depuis plusieurs années, l’hydrogène fait figure de solution miracle pour décarboner les mobilités, l’industrie et stocker les énergies renouvelables. Mais comment est-il produit ? Comment est-il stocké et transporté ? Quels usages peut-on en faire ? Nous commençons cette série de podcasts par l’hydrogène. Avant tout, connaissez-vous l’hydrogène ? Savez-vous comment il est produit ? Nicolas Dattez, qui anime le groupe de travail hydrogène de Leonard, est ici pour tout nous expliquer.

 

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– Bonjour Nicolas.

– Bonjour Clara.

– On constate ces derniers mois un engouement autour de l’hydrogène. Est-ce que l’utilisation de l’hydrogène avait déjà été envisagée auparavant ?

– Alors oui, l’hydrogène, ce n’est pas nouveau du tout. On utilise d’ailleurs depuis des décennies de l’hydrogène. On produit actuellement dans le monde environ 90 millions de tonnes par an d’hydrogène qui servent aujourd’hui principalement à l’industrie chimique, dans les processus de raffinage par exemple, ou encore pour produire de l’ammoniac, qui est l’ingrédient principal des engrais.

Donc l’hydrogène, c’est déjà aujourd’hui employé dans l’industrie, mais ça le sera encore plus demain, car il servira à des processus qui permettront de limiter les émissions de CO2. Par exemple, il pourra être utilisé pour synthétiser du carburant ou du gaz à partir des CO2 émis par les industries, ou on pourra aussi l’employer comme combustible, par exemple à la place des énergies fossiles. Parce que quand on brûle de l’hydrogène, on émet principalement de l’eau. Et enfin, on pourra l’utiliser pour alimenter des piles à combustible qui utilisent l’hydrogène pour fabriquer de l’électricité et de la chaleur.

– Mais alors, pourquoi n’est-il pas plus utilisé depuis longtemps ?

– Eh bien parce que la situation a un petit peu changé. Nous arrivons maintenant dans un état d’urgence climatique que l’on peut qualifier d’extrême. On en a pleinement pris conscience. Il est aujourd’hui impératif de limiter rapidement et de limiter au maximum le réchauffement climatique. Ça implique de limiter, voire de stopper les émissions de gaz à effet de serre. Et comme une grande partie de ces gaz à effet de serre provient de l’utilisation des énergies fossiles (charbon, gaz, pétrole) et des divers processus industriels, il est important de trouver des solutions alternatives. Et l’hydrogène, qui a des caractéristiques un peu spécifiques, peut offrir des solutions intéressantes.

– Quelles sont ces caractéristiques spécifiques ?

– Il y a trois grandes caractéristiques à retenir pour l’hydrogène. La première, c’est que l’atome d’hydrogène est omniprésent. C’est l’élément le plus abondant sur Terre. On le retrouve dans les composés organiques. Nos corps, par exemple, sont constitués aux deux tiers de l’atome d’hydrogène. On le retrouve dans l’eau. L’eau, qui a pour formule chimique H2O : deux atomes d’hydrogène, un atome d’oxygène. Et on le trouve également dans les hydrocarbures, comme le méthane par exemple, qui a pour formule CH4. Alors il y a un problème néanmoins, c’est qu’on le trouve très peu, cet hydrogène, sous sa forme pure de dihydrogène de formule H2, deux atomes d’hydrogène qui sont liés. Donc pour utiliser l’hydrogène, il faut le fabriquer sous cette forme de dihydrogène H2. C’est cette première caractéristique, cette omniprésence de l’atome. La deuxième caractéristique, c’est son énergie massique qui est très importante. C’est-à-dire que la quantité d’énergie contenue dans un kilogramme d’hydrogène, c’est environ trois fois plus important que l’énergie qui est contenue dans un kilogramme de diesel. Donc c’est un point très très positif car à masse égale on a beaucoup plus d’énergie qu’avec des carburants classiques. En revanche, et c’est la troisième grande caractéristique, c’est un gaz très peu dense et son énergie volumique est très faible. C’est-à-dire que même si on le comprime beaucoup, à 700 bars, c’est 700 fois la pression atmosphérique, il faudrait sept litres d’hydrogène pour avoir la même quantité d’énergie que dans un litre de diesel. Et là, on comprend bien que c’est un point qui complique les choses, notamment pour le transport de ce gaz.

– Vous nous avez dit que l’hydrogène est peu présent à l’état naturel et qu’il faut le produire. Comment faire ?

– Alors pour synthétiser de l’hydrogène, il faut extraire les atomes d’hydrogène des molécules dans lesquelles ils se trouvent. Donc, on l’a vu, ça se trouve dans les hydrocarbures, dans la matière organique ou dans l’eau. Et pour ça, il y a trois grands types de processus. La manière la plus répandue aujourd’hui, c’est ce qu’on appelle la réaction de vapo-reformage. C’est une réaction chimique qui consiste à faire réagir de l’eau avec du méthane afin de produire de l’hydrogène et du CO2. Mais cette réaction, je l’ai dit, émet beaucoup de CO2, donc on obtient de l’hydrogène dit carboné. 9 à 10 kilos de CO2 sont émis pour un kilos d’hydrogène créé. Une deuxième manière est appelée la gazéification. Là, on va chauffer fortement un composé qui est carboné, du charbon par exemple. Mais ça peut aussi être de la biomasse en présence de réactifs gazeux. Et cela va former,
après diverses étapes, un gaz de synthèse qui lui contient de l’hydrogène. Mais là encore, cette méthode émet beaucoup de CO2, environ 19 kilos de de CO2 pour un seul kilo d’hydrogène synthétisé. On obtient donc à nouveau de l’hydrogène carboné.

– Et la troisième manière ?

– La troisième manière, qui est la plus vertueuse en termes d’émissions, c’est ce qu’on appelle l’électrolyse de l’eau. On va utiliser de l’énergie électrique pour séparer les atomes de la molécule d’eau H2O et on va obtenir d’un côté de l’oxygène et d’un autre côté de l’hydrogène et pas de CO2. Donc j’ai dit que cette manière était la plus vertueuse… Mais attention, ce n’est le cas que si l’énergie électrique qui est utilisée pour faire cette électrolyse est elle-même décarbonée. Car si on utilise de l’énergie électrique, de l’électricité produite par une centrale à charbon pour faire de l’hydrogène, alors cet hydrogène sera considéré lui-même comme carboné, même si on la fait par électrolyse. Il est donc primordial que l’électricité qui est employée pour l’électrolyse provienne d’un mix électrique qui est pas ou très peu carboné comme les énergies renouvelables, et on obtient alors de l’hydrogène renouvelable.

– Si je comprends bien, on a deux types d’hydrogène : l’hydrogène carboné et l’hydrogène renouvelable.

– Alors pas seulement. La France classe l’hydrogène en trois catégories : l’hydrogène carboné, l’hydrogène bas-carbone et l’hydrogène renouvelable. L’hydrogène carboné, on en a parlé, c’est l’hydrogène qui est produit à partir d’énergies fossiles. C’est le vapo-reformage, c’est la gazéification du charbon ou c’est l’électrolyse qui est elle-même alimentée avec des mix électriques qui sont carbonés. L’hydrogène bas-carbone, quant à lui, est produit à partir de sources d’énergie qui ne sont pas renouvelables mais qui respectent un certain seuil d’émission de CO2 par kilo d’hydrogène produit. Donc ce seuil d’émission, il n’est aujourd’hui pas fixé. Il est en cours de discussion, en lien bien sûr avec l’Europe, mais il devrait s’approcher de trois kilos de CO2 émis par kilo d’hydrogène produit. Donc le nucléaire, c’est l’hydrogène produit par électrolyse avec de l’électricité issue du nucléaire rentrerait dans la catégorie hydrogène bas carbone. Et enfin, le troisième type, c’est l’hydrogène renouvelable, qui est produit à partir de sources d’énergies renouvelables et dont le procédé de production respecte toujours ce seuil d’émission. La manière la plus évidente de faire de l’hydrogène renouvelable, c’est l’électrolyse à base d’électricité issue des EnR. Il faut noter que le vapo-reformage, quand il s’applique au biogaz, ou la gazéification quand elle s’applique à la biomasse, peuvent rentrer dans cette catégorie. Et cela car la biomasse et le biogaz, qui est lui-même issu de la biomasse, ne contiennent pas de carbone fossile.

– Merci Nicolas. Nous savons donc pourquoi l’hydrogène revient sur le devant de la scène et on sait comment aujourd’hui, on peut le synthétiser de manière vertueuse. Rendez-vous dans le deuxième podcast de cette série pour savoir comment le stocker et le transporter.

Et merci d’avoir écouté Des mondes à construire, le podcast de Leonard. Au fait, Leonard, c’est la plateforme d’innovation et de prospective du groupe VINCI.

Retrouvez toutes nos informations sur leonard.vinci.com.

À bientôt !

* Des mondes à construire, c’est le podcast de Leonard pour mieux comprendre les transformations des villes et des territoires, l’avenir des métiers de la construction, des mobilités, de l’énergie…   
À chaque saison, nous abordons une thématique sous différents angles, en allant à la rencontre d’experts qui nous expliquent simplement et en moins de 10 minutes un aspect spécifique de leur sujet.

 

 

 

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