Construire la ville Zéro Carbone : quels défis pour la rénovation ?

Le cycle de rencontres “Construire la ville Zéro Carbone” s’est poursuivi mardi 29 janvier en rassemblant à Leonard:Paris constructeurs, maître d’ouvrages et démolisseurs pour discuter des défis et challenges de la rénovation bas carbone.

Rénovation bas carbone

La conférence est disponible en intégralité sur YouTube.

Les vertus cachées de la rénovation

Les réalisations estampillées bas carbone sont plus souvent observables dans les projets de construction que de la réhabilitation. Pourtant, Armelle Langlois, Directrice du pôle Performance Durable chez VINCI Construction France, rappelle que le marché de la rénovation bas carbone se développe rapidement : il faut dire que le recours à la méthode de l’ACV (pour Analyse du Cycle de Vie) bouscule le préjugé selon lequel les constructions neuves seraient plus vertueuses que les rénovations en matière de performance carbone. La réutilisation du gros oeuvre dans les bâtiments rénovés permet par exemple l’économie d’environ 300 kg équivalent carbone par mètre carré, avantageant ainsi le bilan carbone du bâtiment rénové par rapport à celui d’un bâtiment neuf, et ce pendant plusieurs dizaines d’années.

Zéro Carbone 3

La méthode de calcul du bilan carbone applicable à un projet de réhabilitation est sensiblement la même que pour un bâtiment neuf. Hélène Genin, déléguée générale à BBCA,  rappelle les 4 indicateurs observés pour mesurer le bilan carbone d’un bâtiment rénové :

  • L’exploitation, le chauffage et la climatisation du bâtiment pouvant atteindre 80 à 90% des émissions de gaz à effet de serre dans le cas d’une rénovation thermique ;
  • Les matériaux. Démolir, remplacer des matériaux non amortis aura une incidence sur le bilan carbone du bâtiment ;
  • Le stockage du carbone par les matériaux employés dans la construction du bâtiment ;
  • L’économie circulaire, point-clé de la rénovation. La revalorisation de matériaux, la mutualisation d’espace ou une plus grande réversibilité seront pris en compte dans le calcul du bilan carbone.

Le label BBCA, qui se base sur ces différents indicateurs, a déjà attribué sa certification à près de 40 bâtiments, dont 3 opérations en rénovation depuis le lancement de son label “BBCA Rénovation” en octobre 2018.

 

L’économie circulaire, premier levier d’une rénovation à bilan carbone allégé

Alors que les déchets du BTP représentent 25% des émissions des gaz à effet de serre par an en France, le réemploi des matériaux s’avère déterminant pour réduire significativement ce poste d’émission. Constructeurs et maîtres d’ouvrage s’associent pour changer les pratiques et favoriser un réemploi plus vertueux et raisonnable des matériaux. L’association Circolab, dont VINCI Construction France est membre fondateur, rassemble les maîtres d’ouvrage pour exploiter et revaloriser les déchets du BTP. Les modalités de calcul du bilan carbone d’une opération favorisent aussi ce changement de paradigme : tout remplacement d’éléments (moquettes, parquets…) alourdit désormais le bilan carbone, qui doit à présent intégrer l’empreinte carbone des nouveaux matériaux, le temps d’amortissement des matériaux remplacés et les déchets produits.

Zéro carbone 3 Keusch Mahamdou

Pour Anne Keusch, directrice du Développement Durable et de l’Innovation chez Groupama Immobilier, la transition vers l’économie circulaire ne va pas sans défi : il faudra prouver que le réemploi est compétitif par rapport à l’emploi de matériaux neufs, et modérer les craintes des assureurs, qui rechignent encore à assurer les matériaux réutilisés malgré leur traçabilité. L’économie circulaire implique des opérations supplémentaires (démonter, palettiser, transporter et surtout stocker les matériaux revalorisés) qui engendre un surcoût annoncé entre 10 et 20% par rapport à une rénovation recourant à des matériaux classiques. Des défis partagés par Salim Mahamdou, responsable Qualité et Environnement chez Neom, filiale de VINCI Construction France spécialisée dans le curage, le désamiantage et le démantèlement, pour qui ce travail de recyclage des matériaux se double d’une réduction des émissions produites par les engins de déconstruction, en favorisant le recours à l’électrique.

Mais avant de penser le réemploi, l’effort de réduction de l’empreinte carbone se joue dès l’étape de la conception et du choix des matériaux. Les données exactes manquent encore pour effectuer les meilleurs choix au moment de la construction comme de la rénovation. Les FDES (fiche de déclaration environnementale et sanitaire) de nombreux produits n’informent encore que des valeurs théoriques. BBCA milite déjà en faveur de  la publication de données exactes pour mesurer au plus près l’empreinte carbone d’un bâtiment. Simplicité et lisibilité : voici les futurs mots d’ordre qui devront orienter les acteurs du secteur !

La détermination de tous les acteurs et l’ambition de dépasser les référentiels bas carbone actuels seront indispensables pour créer de nouveaux standards en faveur d’une rénovation à empreinte carbone réduite.

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