Une affaire de bobines
Le transfert d’énergie par induction électromagnétique est une idée développée dès le XIXème siècle notamment par Nikola Tesla. Grossièrement, elle permet la distribution d’un courant électrique sans branchement. Alimentée en courant électrique, une bobine génère un champ magnétique qui, reçu par une seconde bobine, peut être retransformé en courant électrique. Ainsi, en wireless, une bobine émettrice peut transmettre du courant à une bobine réceptrice. Ces dernières années, les progrès techniques en la matière ont permis d’envisager des solutions de recharge sans contact pour des véhicules électriques.
Deux applications sont actuellement expérimentées, la recharge statique et la recharge dynamique. La première, à la manière d’une borne de recharge classique, immobilise le véhicule mais facilite l’opération pour l’usager qui n’a pas à effectuer de branchement. La seconde est bien plus prometteuse puisqu’elle permet de recharger un véhicule pendant qu’il roule, grâce à des bobines émettrices placées sous le revêtement de la route. Testée dans plusieurs pays, cette solution pourrait accélérer la transition vers les véhicules électriques.
La route sans fil
Au delà de l’amélioration de l’expérience utilisateur, l’atout majeur de l’induction (et de la recharge dynamique en général) est de permettre de réduire la taille des batteries de véhicules électriques. En effet, si la route recharge le véhicule, la question de son autonomie devient secondaire. Ainsi, le coût et le poids du véhicule mais aussi les besoins en minerais rares qui composent la batterie diminuent.
En termes d’aménagement et de mobilité, de nouvelles perspectives s’ouvrent. Implémenter la recharge directement dans la route permet de libérer de l’emprise foncière, ce qui permet de compléter une offre de bornes de recharge, lorsque celle-ci est limitée par le foncier disponible. C’est notamment le cas en milieu urbain dense. De plus, un véhicule qui n’a pas besoin de s’arrêter peut rouler théoriquement en continu et maximiser l’offre de mobilité.
La route sans-fil
D’autres solutions de recharge dynamique existent comme le rail ou le caténaire. Auteur en 2017 d’une évaluation socio-économique de la route électrique, le ministère de l’environnement français s’est intéressé au caténaire qu’il voit comme une opportunité de valoriser l’expertise du secteur ferroviaire. Comparativement, l’induction a l’avantage de réduire la maintenance, les problèmes d’interopérabilité et la pollution visuelle. Son coût d’installation est en revanche plus élevé.
D’ailleurs, la même année, la première expérimentation française de route électrique “wireless” avait lieu à Satory. Financée par le programme européen FABRIC, elle associait Renault, l’institut de recherche VEDECOM et Qualcomm, le géant américain de la technologie mobile. Un utilitaire Kangoo Z.E a reçu jusqu’à 20kW en roulant à 100km/h sur une piste d’essai.
Décollage imminent ?
Plus récemment, la start up israélienne ElectReon qui développe une solution de routes à induction a signé un accord de partenariat stratégique avec Eurovia, filiale de VINCI. Après avoir testé sa technologie à Tel Aviv et sur l’île de Gotland en Suède, elle entend élargir ses activités à la France, l’Allemagne et la Belgique. Eurovia s’engage ainsi à intégrer l’induction dans sa gamme de produits, à construire et faire la maintenance de ces nouvelles routes électriques.
Ce partenariat pourrait offrir un tremplin à l’induction en Europe : « Aujourd’hui, on n’est plus tant dans une problématique de R&D que dans un enjeu d’intégration et de définition d’un modèle économique » estimait Arnaud Banner, directeur technique de VINCI Energies, en début d’année.
En parallèle, les efforts de relance post-Covid-19 pourraient bénéficier à l’induction. Si le plan de relance national s’est concentré sur l’aide aux bornes de recharge et à l’achat de véhicules, la région Île-de-France a fait preuve de plus de volontarisme sur le sujet. À l’issue de sa COP en septembre dernier, la région a retenu 192 propositions pour sa reconstruction écologique. Afin de décarboner la route et la mobilité, elle prévoit de « réaliser la première portion expérimentale d’autoroute électrifiée (recharge des véhicules électriques par induction) en Île-de-France ».