Le terme « intrapreneurs » désigne ces salariés que leur entreprise encourage à développer un nouveau business en leur sein. Ce néologisme amusant de prime abord, car fondé sur un pas de côté, révèle au fond une intéressante et intrinsèque contradiction: il évoque la prise d’initiative et l’autonomie, et en même temps les situe au sein d’une organisation dont un des fondements est le contrôle. Une opposition qu’on retrouve également dans la célèbre définition de Pinchot :
« Intrapreneurs are the dreamers who do ».
Il en va de même lorsqu’on passe du mot à la chose ; avec à peine 9% des entreprises concernées d’après Deloitte, l’intrapreneuriat made in France relève encore du vœu pieux et les programmes existants manquent encore de maturité. Et pourtant… les salariés (12% des effectifs), eux, sont demandeurs : 90% ceux qui s’y sont déjà essayé se disent prêts à recommencer !
L’intrapreneuriat s’affirme ainsi progressivement comme une composante de plus en plus nécessaire de toute démarche « corporate » d’ innovation, et un levier d’attractivité de plus en plus puissant pour les talents que les entreprises ont besoin de recruter et surtout de conserver.
Les entreprises ont donc tout intérêt à s’y intéresser de près, tout en anticipant difficultés et malentendus avec lucidité.
Comprendre ce que l’intrapreneuriat n’est pas
Commençons par les malentendus sur le sujet.
L’intrapreneuriat n’est ni une gestion « en mode projet » déguisée, ni une surcharge de travail qui ne dit pas son nom. Ce n’est pas plus une course à l’innovation sous la contrainte ou encore une tentative d’amélioration de l’existant. Ce n’est pas enfin une démarche incrémentale d’optimisation des process et des organisations existants.
L’intrapreneuriat constitue tout au contraire une approche transformative à base de tests et d’expérimentations, une démarche de « chaos créatif » qui vise à détecter et encourager des projets « hors champ ».
C’est également, du point de vue de l’intrapreneur cette fois, un processus de maturation autorisé, nécessaire pour conduire à une création d’activité qui sorte des sentiers battus. C’est surtout une approche humble qui nécessite de sortir de sa zone de confort et de se jeter à l’eau…
C’est sur ces convictions fondatrices qu’a été bâti le programme d’intrapreneuriat lancé par Leonard l’été dernier.
Accepter de se confronter à l’échec
On ne peut pas non plus occulter la question de l’échec, parfois explicitée très tôt, souvent plus discrète, mais au fond si française ; si le « droit à l’erreur » n’est plus tabou, il n’a pas encore conquis son droit de cité dans notre culture.
Pourtant, « oser, c’est d’abord oser l’échec », comme le formule le philosophe Charles Pépin dans son dernier essai.
Et c’est d’ailleurs le point commun de tous les intrapreneurs de notre promotion 2017 : l’envie de se confronter à l’échec possible, l’audace de viser la réussite, la détermination à apprendre dans tous les cas. En un mot, le courage de s’engager et d’explorer les risques, avec l’avenir du Groupe en ligne de mire.
Dans pareil contexte, il n’est d’autre promesse possible que celle de fournir à chacune et chacun les moyens concrets de porter son projet. C’est la raison pour laquelle notre programme est articulé autour de deux phases distinctes, d’intensité inégale :
- la phase d’incubation, de 4 mois, pendant laquelle l’intrapreneur consacre 1 jour par semaine à la définition et à la maturation de son projet
- la phase d’accélération, d’une durée de 4 mois également, au cours de laquelle il / elle s’y consacre à 100%.
Mesurer le (vrai) succès de l’intrapreneuriat
On nous demande parfois quel est l’objectif de sélectivité à l’entrée du programme, à la fin de la période d’incubation, et à l’issue de l’accélération ; cette question n’a pas grand sens à ce stade me semble-t-il, vous ne choisissez pas la maille de votre filet tant que vous n’avez pas vu les poissons…
À date, le succès du programme ne peut se mesurer au seul nombre de projets aboutis ou de nouvelles Business Units développées pour les bonnes raisons que :
- le programme est à peine à 40% d’avancement
- il s’agit de la toute première promotion, il est donc impossible de nous calibrer de manière différentielle ; ceci vaut également pour les intrapreneurs de la promotion 2017, qui n’ont pas d’aînés à qui demander des tuyaux…
Les intrapreneurs de cette première promotion 2017 ont ainsi le double mérite de s’être non seulement jetés à l’eau, mais de l’avoir fait dans une piscine en cours de construction et dont ni le niveau, ni la température de l’eau ne sont stabilisés…
Il me semble donc plus approprié de juger le succès à la montée en compétences des collaborateurs, qui ont appris à tester et donner forme à une idée jusqu’à en faire un business viable, et qui ont exploré de nouvelles approches pour faire de leurs projets des succès. Finalement, l’intrapreneur est, en lui-même, le capital que nous cherchons à développer.
Allier générosité et exigence
Les facteurs clés de succès sont en revanche déjà identifiés : l’implication du top management, des managers, des communautés de salariés impliqués et des responsables des ressources humaines sont absolument critiques, notamment si on souhaite assurer un passage de témoin réussi entre la promotion 2017 et la future promotion 2018.
La générosité et l’exigence vont ainsi de pair : lorsqu’il faut savoir dire « non » et l’expliquer, pour donner à nos collaborateurs la mesure du talent avec lequel ils ont osé, analysé, exploré, avant de conclure qu’il fallait décrocher ou raccrocher.
Mais aussi pour savoir dire « oui » et expérimenter le culot de la réussite avec tous les métiers de VINCI !
Et c’est bien là l’ambition de Leonard : être le pont entre les expertises et les énergies créatives individuelles, le catalyseur d’un changement de culture interne, et l’amplificateur des talents incroyables que recèle le Groupe.
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