Akanthas développe et commercialise un logiciel et un hardware fondés sur l’utilisation de l’IA pour analyser plus facilement les déchets industriels et optimiser les opérations de collecte et de traitement. Des capteurs d’image autonomes installés sur le terrain mesurent en temps réel le taux et la nature du remplissage (bennes, alvéoles, etc.) pour en extraire des indicateurs de performance, des alertes et des recommandations aidant à la prise de décision. Elle fait partie des dix start-ups sélectionnées par Leonard pour participer au programme SEED 2022.
R.Use est une marketplace portée par Thibaut Gelain et Anne Visier pour le réemploi de matériaux et matériels de chantier interne à VINCI. Utilisable sur smartphone, ordinateur ou tablette, l’application permet de déposer des annonces et de chercher des ressources pour les chantiers, par catégorie ou par géolocalisation. R.Use a été finaliste du prix de l’environnement VINCI et admise dans la promo Intrapreneurs 2022 de Leonard pour travailler sur le déploiement de l’application.
Qu’est-ce qui vous a poussé à entreprendre dans le domaine de l’économie circulaire ?
Viviana Contreras : Les déchets professionnels, notamment dans le secteur de la construction, offrent un potentiel de valorisation important. Mais les opérateurs sur le terrain sont paradoxalement confrontés assez systématiquement à des dépassements de budget pour leur traitement. Cela s’explique notamment par le manque d’estimations précises sur les quantités de déchets générés, la mauvaise optimisation des collectes, le déclassement ou la non-conformité de certaines ressources ou encore des données trop globales par rapport à la réalité terrain. Cela a aussi un coût environnemental énorme avec des déchets non valorisés et une empreinte carbone élevée. Une mesure précise et une caractérisation en temps réel est pourtant essentielle pour pouvoir optimiser et garantir le développement durable du secteur. C’est ce qui a motivé la création d’Akanthas !
Anne Visier : Le projet R.Use est né d’une réflexion du groupe de travail économie circulaire de VINCI Construction France en Provence. Dans le cadre de nos réflexions, un des besoins identifiés était de créer un outil favorisant la mise en relation des personnes ayant des ressources de seconde main disponibles et celles qui en auraient besoin sur d’autres chantiers. Le but étant de dépasser les réseaux de connaissances directes pour créer un écosystème plus large. Au fil de la réflexion, nous avons constaté que ce type d’outils est très demandé et attendu : plusieurs initiatives similaires ont été déposées au Prix de l’environnement de VINCI et l’annonce de l’arrivée de l’application est accueillie avec enthousiasme par les chefs de chantier et ingénieurs travaux.
Vos solutions reposent sur le développement d’outils digitaux. Pourquoi a-t-on besoin du numérique pour faire décoller l’économie circulaire dans la construction ?
Anne Visier : A mes yeux, les facteurs essentiels pour le développement de l’économie circulaire sont l’ancrage territorial, le dynamisme du réseau et la temporalité pour réussir à faire correspondre l’offre et la demande. Le digital permet de créer des outils très efficaces pour répondre à une partie de la problématique : R.Use permet ainsi de créer des annonces visuelles et de les mettre à jour en temps réel, d’accéder aux données de géolocalisation, de temporalité (avec les dates de mise à disposition). Nous travaillons aussi sur le suivi de l’impact généré, environnemental, financier, et bien sûr sur de nouvelles fonctions pour faciliter le processus d’achat par l’application. Bref, le digital est un excellent outil pour créer du réseau et faire du suivi d’impact.
Mais les outils digitaux ne permettent néanmoins pas tout : il faut aussi trouver le moyen de donner envie de les utiliser, qu’ils soient là pour simplifier la vie, être pratiques. Sinon, l’outil sera créé mais ne sera pas utilisé. Le véritable défi est là : rendre les outils du réemploi intuitifs et simples pour favoriser l’économie circulaire.
Viviana Contreras : Je peux ajouter que sur le terrain nous sommes souvent à l’aveugle sur les déchets. Depuis des années, les entreprises mesurent combien d’électricité, d’eau ou de carburant elles consomment. Ces données sont la clé pour réduire les surconsommations et les inefficacités. En revanche, sur les déchets, les entreprises ne mesurent en général presque rien. Le constat est clair, ce qui ne se mesure pas ne change pas. Pour tendre vers l’économie circulaire, il faut optimiser à la source.
Comment vos solutions peuvent-elles aider les acteurs de la construction à répondre aux évolutions de la réglementation environnementale ?
Viviana Contreras : En France, nous avons d’un côté la loi Anti-gaspillage pour une économie circulaire, avec un volet très fort sur la gestion des déchets pour le secteur du bâtiment. Avec la nouvelle filière REP pour le secteur, des règles précises sur la collecte et la valorisation des déchets rentrent en application à partir de 2023. Notamment en ce qui concerne la reprise sans frais de tous les types de déchets du bâtiment lorsqu’ils sont triés. Nous voulons ainsi aider le secteur de la construction à surmonter ces enjeux en apportant les outils qui permettront de contrôler les déchets et garantir leur valorisation.
Nous avons de plus les aspects réglementaires liés à la collecte et au transport. Il faut savoir que lorsque l’on parle d’une collecte non optimisée, il s’agit entre autres d’une benne sous-chargée ou surchargée. Dans le cas de la surcharge, les acteurs sont confrontés à des problématiques de sécurité routière avec de graves sanctions et risques. Nous voulons éviter que cela se produise, de nouveau en mesurant le gisement à la source.
Anne Visier : R.Use s’intègre aussi bien sûr dans le cadre général de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC). L’application doit faciliter le réemploi interne et donc prolonger les ressources que nous utilisons sur nos chantiers et dans l’entreprise.. En parallèle la REP (responsabilité élargie du producteur, basée sur le principe pollueur payeur) évoquée à l’instant par Viviana, évolue aussi et s’étendra bientôt au bâtiment (janvier 2023) et la TGAP (Taxe Générale sur les Activités Polluantes) augmente aussi rapidement dans le coût de traitement des déchets. Donc plus nous diminuerons nos déchets, mieux nous nous porterons, aussi bien en termes environnementaux qu’en termes financiers. Et R.Use aide aussi à cela.
Enfin, la RE2020 dans sa version actuelle compte un impact carbone nul pour les ressources issues du réemploi dans les projets bâtiment. Cela démontre la volonté de changer les habitudes, et d’intégrer l’économie circulaire à toutes les échelles dans la construction. R.Use n’est pas impliqué directement sur ce sujet, mais l’application permet justement de favoriser ce changement de comportement, de favoriser le réemploi. Et la démarche est si vaste que tout levier, tout outil est important pour que chacun se saisisse des enjeux et de son pouvoir d’action propre.
Quels changements vos solutions impliquent-elles pour les équipes sur le terrain ?
Viviana Contreras : Notre solution se veut une aide à la décision pour mieux anticiper, réduire les coûts, simplifier un certain nombre d’activités et non remplacer l’humain ni à surveiller qui est le responsable d’une erreur de tri ou d’une anomalie. Notre solution aide d’une part les équipes opérationnelles sur le terrain à gérer et suivre plus facilement l’activité déchets. Elle aide aussi les équipes de conception, pilotage et suivi à avoir une vision globale beaucoup plus précise de la performance environnementale du pôle déchet, avec des chiffres et recommandations clés pour mettre en place une démarche d’amélioration continue.
Anne Visier : Pour aller vers le réemploi, il faut se poser la question : ai-je besoin d’acheter une ressource ? Et si oui, est-ce que je peux la trouver d’occasion au lieu d’en acheter une neuve ? Donc avant d’acheter une ressource neuve, il faut avoir le réflexe de réfléchir à son réel besoin, et à son impact, et n’acheter neuf qu’en dernier recours. C’est un vrai changement de comportement vers lequel il faut aller et que R.Use souhaite accompagner.
Quelles perspectives de développement imaginez-vous pour vos solutions respectives ?
Anne Visier : Actuellement, l’application R.Use permet uniquement la mise en contact. Nous réfléchissons à plusieurs possibilités de développement : faciliter la commande depuis l’application, permettre le règlement sur l’application, proposer des services de transport, ou encore mesurer l’impact financier et environnemental du réemploi.
En ce qui concerne la diffusion, nous déployons actuellement l’application dans les différentes directions déléguées de VINCI Construction France, pour ce premier semestre 2022. Et nous travaillons aussi sur un déploiement à VINCI Construction et aux autres pôles pour un lancement dès que possible dans le courant de l’année.
Viviana Contreras : Nous avons commencé la commercialisation de notre solution au printemps 2021 et aujourd’hui nous avons aidé plusieurs entreprises à diminuer leurs dépenses de gestion et à augmenter la valorisation de ses déchets (+150 conteneurs analysés). Nous continuons le développement de nos modèles d’IA pour analyser de plus en plus de typologies de déchets industriels, avec une granulométrie de plus en plus fine et dans une multitude de contextes industriels.
2022, pour nous, est l’année de l’accélération commerciale. Nous avons plusieurs déploiements en cours à l’échelle nationale et nous préparons notre déploiement également dans d’autres pays européen. Pour ce faire, nous allons renforcer nos équipes en recrutant d’avantage de talents techniques.
Contacts :
Akanthas : Viviana Contreras (viviana.contreras@akanthas.com)
R.Use : Thibault Gelain (thibaut.gelain@vinci-construction.fr) et Anne Visier (anne.visier@vinci-construction.fr)