Mobilités électriques : les villes mènent la charge

Les villes du monde entier promettent de bannir les véhicules thermiques à plus ou moins long terme. L’avènement d’une mobilité urbaine 100% électrique est-elle à portée de main ?
station de chargement voiture électrique
Photo by Jan Kaluza on Unsplash

 

« La bonne échelle pour agir, ce sont les villes et les territoires. Les Etats ne peuvent pas lutter seuls. » Anne Hidalgo, la maire de Paris résume en quelques mots une tendance forte, en faveur d’une décentralisation de la gouvernance environnementale au profit des centres urbains. Alors que la pollution de l’air serait responsable de plus de 3 millions de morts par an dans le monde, les villes n’hésitent plus à court-circuiter les États, souvent impuissants à imposer les bonnes mesures écologiques. Symbole de l’émergence d’une urbanité « décarbonée », la mobilité électrique devient aujourd’hui un véritable enjeu politico-économique. « Gas-ban », flottes 100% électriques, villes laboratoires, Leonard s’est penché sur des initiatives souvent prometteuses et parfois clivantes.

 

Une généralisation des « gas-bans »

 

Pour les villes, l’interdiction des moteurs thermiques est devenue un message fort. La Fossil Fuel Free Streets Declaration, mise en place par le réseau C40, compte déjà des villes majeures telles que Paris, Milan, Rome, Madrid ou Los Angeles. La majorité des métropoles concernées s’engage à bannir complètement les moteurs thermiques d’ici 2030. D’autres suivent déjà autour d’engagements à géométrie et calendriers variables. En France, Orléans souhaite être la première ville au réseau de bus 100% électrique d’ici 2026. À Oxford, la fin des véhicules thermiques devrait coûter 7 millions de livres, et misera sur l’utilisation de technologies de reconnaissance des plaques d’immatriculation. Londres déploie une opération pragmatique de rue « zéro-émission » afin de tester les effets du bannissement. Plus extrêmes, les projets de villes « laboratoires » doivent également permettre de mesurer les effets d’une mobilité décarbonée. C’est le cas à Woven City, la ville du futur présentée par Toyota au CES 2020, qui sera construite au pied du Mont Fuji et qui devrait faire la part belle à l’hydrogène et aux mobilités douces.

 

Ces transitions impliquent souvent une refonte complète du mix énergétique, au profit de l’électrique. Elles posent également la question de la provenance de l’électricité. Aujourd’hui, aucune ville majeure ne peut se targuer d’un fonctionnement 100 % renouvelable. Il faut se pencher sur des villes moyennes telles que Burlington, aux États-Unis, pour trouver des candidats exemplaires. Avec une combinaison de biomasse, de solaire, d’éolien et d’hydroélectricité, cette ville du Vermont est l’une des premières au monde à ne pas s’appuyer sur des ressources fossiles.

 

Accompagner la transition

 

Avant de réaliser une bascule complète, les villes devront lever les freins d’usage, dépasser les barrières technologiques, et mettre un terme aux luttes d’influence. Les intérêts faramineux mis en jeu réveillent le camp des « pro-gas », qui organisent la riposte. En Californie, une association d’acteurs des énergies fossiles – Partners for Energy Progress – organise le lobbying « anti-ban » autour d’une campagne de relations presse à 1 million de dollars. En Angleterre, la société des constructeurs automobiles dénonce la précipitation du gouvernement et l’absence de plan clair. Quant à Paris, où la mise en place des vignettes Crit’air est déjà critiquée comme une mesure restreignant les libertés, on imagine bien qu’un bannissement total des véhicules thermiques ne se fera pas sans heurt.

 

Pour les collectivités, l’enjeu principal consiste à accompagner particuliers et professionnels dans la transition. À ce titre, la question des batteries est exemplaire. Alors qu’elles représentent près de 30 % de la valeur finale d’un véhicule électrique, ces dernières sont très majoritairement fabriquées en Chine. Face à ce déséquilibre commercial, la mise en place d’un « Airbus des batteries » laisse espérer un rééquilibrage… Côté particuliers, les principaux mécanismes d’accompagnement restent les incitations économiques. La ville de Paris propose ainsi des aides à l’achat pour les deux-roues électriques et des avantages pour les personnes qui abandonnent leur véhicule personnel au profit de mobilités « douces ». Pas sûr que cela suffise !

Partager l'article sur