Cleantech, climate tech : le grand retour ?

Alors que l’urgence climatique et écologique s’impose comme l'un des thèmes structurants de la décennie à venir, les technologies peuvent-elles apporter leur lot de réponses ? Soutenues par les attentes de la société civile, des acteurs publics et des investisseurs, ainsi qu’une nouvelle vague d’entrepreneurs, les cleantech et autres climate tech semblent connaître un retour en grâce. Sans tomber dans le solutionnisme technologique, ces innovations pourraient être décisives pour relever le défi de la décarbonation et de la préservation des ressources.

Pour le cinquième volet de notre série de panoramas des grandes tendances transformatrices des villes et des infrastructures, Emerging Trends, Leonard s’associe à Good Tech Lab pour un tour d’horizon des leviers technologiques mobilisables face à l’urgence climatique et écologique.

Rappelons toutefois que  la technologie constitue un pilier fondamental de la réponse à ce défi planétaire, son rôle sera nécessaire mais non suffisant. Parmi les autres piliers, citons les politiques publiques ambitieuses devront jouer un rôle crucial, notamment sur la fiscalité carbone et l’accompagnement de la « transition juste », ainsi que les changements de d’usage vers des modes de vie décarbonés et sobres en ressources.

Focalisé sur les secteurs stratégiques de la construction, des énergies, et des transports, ce panorama dédié aux cleantech et climate tech ne saurait être exhaustif, mais nous l’avons voulu représentatif. Découvrez-le sans plus attendre !

 

Pourquoi ce nouvel engouement ?

Après une euphorie dans les  années 2000 suivie d’un long passage à vide, les cleantech semblent faire leur grand retour sur les devants de la scène. Cette seconde vague de technologies environnementales accélère même depuis quelques mois, sous une bannière en vogue dans la Silicon Valley : climate tech. Ce terme désigne les technologies apportant des réponses à l’urgence climatique : décarbonation, émissions négatives, adaptation, etc. Ce champ recoupe aussi bien les solutions software, que hardware et biotech, là où les cleantech sont le plus souvent associées aux deux dernières catégories.

L’enthousiasme pour les cleantech et climate tech qui s’annonce pour les années 2020 peut s’expliquer par une convergence de plusieurs facteurs :

  • Une intensification de la crise climatique et écologique, et des alertes émises par la communauté scientifique. Les études annonçant des impacts plus rapides et plus importants que prévu se sont succédées depuis dix-huit mois : trois rapports spéciaux du GIEC (1,5°C, océans et cryosphère, usage des terres), le rapport IPBES sur la biodiversité, le Global Resources Outlook du PNUE sur le rythme insoutenable de consommation des ressources naturelles, ou encore un article majeur dans Nature sur les points de bascule climatiques.
  • Une société civile qui se mobilise, notamment sous l’influence des jeunes. Dans la rue bien sûr, avec les marches pour le climat, Fridays for Future et Extinction Rebellion. Mais aussi dans les urnes, le porte-monnaie, et les entretiens d’embauche : voir par exemple le manifeste étudiant Pour un réveil écologique.
  • Des gouvernements qui réagissent, en inscrivant dans la loi les objectifs de neutralité carbone (France, Grande-Bretagne, Danemark, Suède, UE, Nouvelle-Zélande, …) ou avec de nouvelles réglementations favorables à l’économie circulaire, la biodiversité, … Ce, sans compter les territoires et les métropoles du C40.
  • Une transformation progressive du secteur privé : à l’instar du géant BlackRock, les investisseurs institutionnels prennent conscience des risques climatiques (voire la Task Force on Climate-related Financial Disclosures), mais aussi des opportunités liées à la fourniture de solutions pour décarboner l’économie. Le constat est unanime et les stratégies bas-carbone prennent forme : un nombre croissant de grands groupes, dont VINCI, se fixe des objectifs de neutralité carbone à horizon 2050.
  • Enfin, l’innovation technologique offre de nouvelles réponses au défi climatique et écologique, tant grâce à l’arrivée à maturité du numérique, qu’aux avancées dans les deeptech, de l’énergie aux matériaux en passant par l’IA.

Ce dernier point a d’ailleurs nourri les observations relayées dans le cinquième paranorama de la série Emerging Trends de Leonard. Si comme nous le rappelions en ouverture, la technologie ne saurait tout résoudre à elle seule, elle offre toutefois des leviers indispensables.

 

Energie : un double besoin de déploiement à grande échelle et de percées technologiques

 

 

Notre dépendance aux combustibles fossiles demeure le plus important des moteurs du réchauffement climatique, et contribue notoirement à la pollution atmosphérique et à la dégradation des écosystèmes naturels. Sous ses différentes formes, notre consommation énergétique génère 72% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, dont 25% dédiés à la seule production d’électricité (GIEC AR5, 2014).

Si les énergies renouvelables (hors hydroélectrique) restent minoritaires, leur développement suivre proche d’un point d’inflexion. En effet, les coûts de l’éolien et, surtout, du photovoltaïque, ont chuté drastiquement ces 10 dernières années. Les installations de capacités suivent une courbe exponentielle, laissant entrevoir un déploiement accéléré dans la prochaine décennie, notamment dans les régions où le mix électrique est très carboné.

Au-delà de l’arrivé à maturité de ces sources renouvelables, un large éventail d’innovations pourrait repousser encore les limites de la décarbonation :

  • Le gain d’efficacité des énergies renouvelables, avec par exemple des matériaux augmentant les rendements photovoltaïques (OxfordPV), de flotteurs permettant aux éoliennes offshore de tirer parti de vents plus puissants, ou encore des progrès dans les énergies marines (Eco Wave Power ou Simec Atlantis)
  • Le dépassement des limites géographiques de la géothermie et de l’hydroélectricité, sources à la fois renouvelables et non-intermittentes
  • La production de chaleur propre à haute température pour l’industrie, avec une nouvelle génération de concentrateurs solaires (Heliogen) ainsi que la récupération de chaleur de basse température habituellement perdue
  • L’essor de combustibles durables, offrant des solutions pour les secteurs difficiles à décarboner, tels que le ciment, l’acier, l’aviation ou le maritime. L’hydrogène pourrait jouer un rôle majeur dans ce portefeuille de solutions, qui devrait également comporter une place pour la biomasse de nouvelle génération ou les carburants de synthèse.
  • Le nucléaire de nouvelle génération, notamment les petits réacteurs (NuScale, Seaborg), moins coûteux, plus sécurisés, produisant moins de déchets (certains de ces réacteurs pourraient même recycler une partie des déchets à longue vie).
  • L’énergie de fusion pourrait être, elle aussi, maîtrisée d’ici 15 ans. Au-delà du projet ITER, une douzaine de startups développent des modèles de réacteurs alternatifs (Commonwealth Fusion, Renaissance Fusion)

Au-delà de la production, la maîtrise du stockage d’énergie est un défi majeur à relever afin de décarboner l’économie mondiale. L’enjeu est à la fois de gérer l’intermittence du solaire et de l’éolien, mais aussi pour gérer plus efficacement les variations de la demande selon l’heure de la journée ou la période de l’année. Le pompage hydroélectrique représente 95% des capacités mondiales de stockage, mais son déploiement est limité par les contraintes géographiques.

Les batteries Li-ion, dont le coût a été divisé par 10 en 10 ans, se sont imposées dans les véhicules électriques. Elles sont en revanche peu adaptées au stockage de longue durée, ou même à un usage stationnaire, pour des raisons de coûts (économique et écologique).

Les domaines d’innovation dans le stockage et la flexibilisation du réseau incluent :

  • Le stockage de longue durée par voie thermique, chimique (power-to-x) ou mécanique. Ces systèmes de nature différente et qui présentent un niveau de maturité varié, sont déployables soit au sein de bâtiments, soit au niveau du réseau, pour stocker de l’énergie pendant plusieurs jours, semaines, voire plusieurs mois. Citons par exemple Azelio, McPhy ou Energy Vault. Les batteries à flux (Form Energy) ou au zinc (e-Zn) sont d’autres technologies émergente pour le stockage de longue durée.
  • Les nouvelles générations de batteries, destinées aux véhicules électriques et le stockage de courte durée, promettent d’améliorer la densité énergétique, la durée de vie, la sécurité, la vitesse de recharge, et de réduire l’impact environnemental liée à l’extraction et la fin de vie des métaux . On peut distinguer (i) les améliorations de la technologie Li-ion (nouveaux matériaux d’électrodes, batteries solides) et (ii) les technologies alternatives, telles que les batteries au sodium (Tiamat).
  • Les super-condensateurs, dont les temps de charge et de recharge quasi instantanés sont notamment adaptés pour récupérer l’énergie du freinage
  • Les technologies « grid edge » permettant de mieux équilibrer le réseau et de tirer parti des capacités distribuées de production et de stockage : centrales virtuelles agrégeant lesdites capacités, systèmes de réponse à la demande, etc.

 

Construction : optimiser la performance énergétique et l’empreinte intrinsèque des infrastructures

 

 

La consommation énergétique des bâtiments représente 18% des émissions mondiales de GES, et 10% de la consommation d’eau potable. Les technologies permettant d’aller plus loin sur l’efficacité énergétique incluent notamment :

  • Les solutions de bâtiment intelligent, qui comprennent divers outils allant du classique pilotage de l’éclairage et des flux (air, eau, chaleur) aux fonctions plus avancées. Par exemple, Carbon Lighthouse équipe chaque bâtiment de 300 capteurs, et utilise le machine learning sur les données récoltées afin d’identifier un éventail de mesures d’efficacité énergétique, pour des gains de 20 à 30%.
  • Les chaufferies et climatiseurs bas-carbone utilisant la récupération de chaleur (chaleur fatale des climatiseurs, chaleur latente de l’air ambiant, réseaux de chaleur), le stockage géothermique (Accenta), ou encore les pompes à chaleur à haute efficacité énergétique et sans HFC (gaz réfrigérant à très fort potentiel de réchauffement global)
  • Les matériaux d’isolation : biosourcés, à changement de phase, aérogels, …

Au-delà des seuls impacts de fonctionnement des bâtiment, vient s’ajouter leur « empreinte intrinsèque ». Le secteur de la construction figure en effet parmi les principaux consommateurs de ressources et producteurs de déchets. Le ciment et l’acier émettent ainsi respectivement 4% et 5% des gaz à effet de serre à l’échelle mondiale, auxquels il faut additionner l’impact lié à l’activité des chantiers. Et ce, alors même que 60 à 70% des infrastructures qui existeront en 2050 n’ont pas encore été construits.

Les matériaux à faible empreinte environnementale constituent donc un terrain privilégié pour les innovateurs des cleantech de la construction. En voici un panel :

  • Les ciments bas-carbone, dont certains sont déjà commercialisés : les géopolymères, ou les ciments alternatifs dans lesquels le clinker est en partie remplacé par des laitiers moulus de haut-fourneau (Ecocem, en partenariat avec VINCI). Parmi les technologies plus émergentes, citons les ciments dérivés de CO2 capturé (CarbiCrete) ou issus de la biotechnologie. Selon les procédés employés, le bilan carbone des ciments bas-carbone est réduit de 30% à plus de 100% (puits de carbone).
  • L’acier zéro-carbone pourrait devenir réalité avec une source de chaleur décarbonée comme l’hydrogène ou un procédé électrochimique comme celui de Boston Metal.
  • Les matériaux circulaires : (i) le réemploi de matériaux inemployés sur chantier via des places de marché (Backacia), ou celui des éléments issus de la déconstruction, au moyen de « passeports matériaux » (Madaster) connectés aux maquettes BIM. Concernant les matériaux non réemployables, (ii) le recyclage progresse, comme en témoigne l’enrobé 100% recyclé mis en place par Eurovia sur l’autoroute A10.
  • Le bois lamellé croisé est un matériau durable et performant dont la demande est en croissance exponentielle. Cette dernière est par ailleurs dopée par l’essor de la préfabrication modulaire, qui s’adapte parfaitement à ce matériau. Certains acteurs comme Katerra proposent une version high-tech de ce procédé, tirant parti des outils de fabrication numérique et d’automatisation.
  • Les piles à combustible permettent de substituer le diesel des groupes électrogènes par de l’hydrogène (Powidian), par exemple pour alimenter les bases-vie. A terme, elles pourraient permettre d’électrifier les engins de construction lourds, tandis que les engins légers existent déjà pour beaucoup en version électrique avec batterie.
  • Les logiciels de conception bas-carbone permettent de réaliser des simulations au niveau du bâtiment (Vizcab) ou de la ville (Urban Footprint)

La dépollution de l’air est un autre enjeu de taille pour le bâtiment. La purification de l’air intérieur, utilisant des systèmes à base de membranes, échangeurs d’air, ou nano-particules, vise à répondre aux obligations sanitaires et au besoin de confort des usagers.

Mais les bâtiments peuvent également contribuer à dépolluer l’air ambiant, par exemple en végétalisant les toits et les façades. Les micro-algues  (Arborea, XTU Architects) ouvrent à ce sujet des pistes prometteuses. Celles-ci offrent un potentiel de dépollution et de capture de CO2 supérieur à la végétation urbaine habituelle par unité de surface, et la possibilité de produire diverses ressources comme des protéines ou du carburant.

 

Transports : batteries, intégration modale, longue distance, trois défis de taille

 

Le défi du secteur des transports est d’adapter les infrastructures à un monde qui s’urbanise à toute allure, tout en réduisant drastiquement les émissions de GES (14% du total au niveau monde, et 29% en France) ainsi que la pollution atmosphérique.

 

Selon l’AIE (dont les estimations sont souvent prudentes), il pourrait y avoir 250 millions de véhicules électriques sur les routes d’ici 2030. Si la production de batteries passe à l’échelle, de même que les investissements dans les infrastructures de recharge, les taux de pénétration restent variables : 50% des ventes en Norvège en 2019 contre 2% en France.

Parmi les domaines d’innovations dans le véhicule zéro-émissions, citons :

  • Les propulsions électriques à batteries : (i) les batteries et supercondensateurs de nouvelle génération, mentionnés plus haut, et (ii) l’extension de la propulsion électrique à des véhicules autres que les voitures et deux-roues : bus (BYD, Proterra), poids-lourds (Xos Trucks), ou mini-avions (Heart Aerospace)
  • Les évolutions de l’infrastructure de recharge : chargeurs rapides dans les stations en libre-accès, vehicle-to-grid (V2G), ou encore, parmi les solutions les plus émergentes, la recharge sans-fil dynamique
  • Le déploiement de l’hydrogène sur les véhicules lourds et la longue distance : camions, trains, mini-avions, porte-conteneurs. Lesdits engins utilisent soit une pile à combustible, seule ou en extension d’autonomie (Symbio), soit un moteur à combustion tournant à l’hydrogène, ou un mix hydrogène-diesel (HyTech).
  • La R&D sur d’autres combustibles durables, toujours sur la longue distance : carburants de synthèse (LanzaTech) et biocarburants de prochaine génération

Dans les grandes villes, les services de mobilité se sont imposés, dont beaucoup favorisent une mobilité décarbonée. Pour les municipalités, l’aménagement des voies piétonnes et cyclables, les vélos en libre accès et les bus électriques sont des « victoires rapides » largement adoptés pour lutter contre la pollution de l’air et le CO2, en renfort des réseaux de métro et tramway. Les voitures et deux-roues électriques partagés (services à l’usage) viennent compléter cette offre de transport décarbonée.

En revanche, les trottinettes en libre-service, si elles demeurent populaires, sont controversées. Celles-ci ont fait l’objet d’analyses de cycle de vie peu flatteuses, mettant en cause la brièveté de la durée de vie du matériel (entre un et trois mois), et le fait qu’elles tendent à se substituer auxmobilités douces et aux transports en commun, plutôt qu’à la voiture individuelle.

Plusieurs paris technologiques ont le potentiel de repousser les limites de la décarbonation dans le secteur de la mobilité urbaine :

  • Une évolution du MaaS (Mobility as a Service) vers une plus forte intégration avec les transports publics (Whim) et une primauté aux mobilités légères et électriques, plutôt que les VTC individuels qui ont popularisé lee concept

 

  • Les véhicules autonomes, partagés et électriques, pourraient en théorie diviser par 10 le nombre de voitures en ville, mais ’autonomie de niveau 5 reste largement hors de portée. Les premiers cas d’usages se concentrent donc sur les zones délimitées et de faible vitesse, adaptées au campus (EasyMile), ou la logistique autonome (Einride)
  • Les outils de simulation des plans de déplacement permettant d’aider les villes à optimiser leurs infrastructures de transport (Replica, Entropy)
  • Les systèmes de transports intelligents recourant à une facturation à l’usage des infrastructures, pariant sur l’impact du signal-prix sur les usagers afin de diminuer le recours aux véhicules très polluants ou peu occupés

 

Le rôle des émissions négatives

 

 

 

Même dans les scénarios les plus optimistes du GIEC, si une décarbonation rapide de l’économie mondiale est fondamentale, elle ne sera cependant pas suffisante pour tenir l’objectif de 1,5°C ou même 2°C. Les modèles employés par les scientifiques pour établir ces différents scénarios nécessitent des « émissions négatives » à plus ou moins grande échelle. Il s’agit du carbon removal : l’élimination d’une partie des gaz à effets de serre déjà accumulés dans l’atmosphère grâce au recours à des puits de carbone.

 

  • Les solutions naturelles reposent sur les processus biologiques, photosynthèse notamment, permettant aux sols et à la végétation de séquestrer le CO2. Les technologies peuvent toutefois aider à faciliter les marchés carbone (Pachama, Nori) ou à accélérer la reforestation (Dendra Systems).
  • Les solutions technologiques visant à créer des puits de carbone artificiels tels que la capture directe dans l’air (Climeworks), la météorisation augmentée (version accélérée du processus naturel d’érosion et sédimentation), et la conversion du carbone capturé en nouveaux produits. Ces derniers incluent matériaux de construction (Made of Air), carburants et produits chimiques (Opus12), plastiques et polymères (Newlight), protéines (Solar Foods) ou nanomatériaux (Carbon Upcycling Technologies) ; une fraction de ces produits pourraient à terme avoir une empreinte carbone négative.
  • Les solutions hybrides combinant photosynthèse et technologie pour créer de nouveaux puits de carbone. C’est notamment le cas du biochar, sorte de charbon de bois utilisé comme amendement de sols (Carbo Culture), ou de procédés prospectifs à base de micro-algues et de phytoplankton. La bioénergie avec capture et stockage du carbone (BECCS) est une autre voie envisagée et souvent évoquée dans les scénarios du GIEC, mais cette méthode est très controversée en raison des problèmes environnementaux liés aux monocultures de biomasse.

Si les solutions naturelles sont les seules véritablement matures aujourd’hui pour capter du CO2 à grande échelle, les deux dernières catégories pourraient arriver à maturité au cours des deux prochaines décennies, afin de former un portefeuille diversifié de solutions.

 

Conclusion

Si cette nouvelle vague des cleantech et climate tech nous permet un optimisme mesuré  pour la décennie cruciale qui s’ouvre, celui-ci ne doit pas nous aveugler. Premièrement, comme nous l’écrivions plus haut, la technologie sera nécessaire, mais non suffisante pour répondre à l’urgence climatique et écologique : les leviers politiques et comportementaux seront également amenés à jouer un rôle tout aussi déterminant.

 

Deuxièmement, la prédominance du réchauffement climatique dans les esprits ne doit pas se faire au détriment des autres communs planétaires — biodiversité, usage des terres, océans, ressources en eau. Il est par ailleurs crucial de favoriser des analyses de cycle de vie et autres méthodes de gestion d’impact rigoureuses. La notion de neutralité carbone, par exemple, souffre d’un manque de standard, auquel la Net Zero Initiative tente de pallier.

 

Enfin troisièmement, les cleantech ont déjà eu leur heure de gloire dans les années 2000, avant que le marché, déçu, ne s’en détourne au profit d’autres investissements. Au-delà de quelques échecs spectaculaires dans les biocarburants ou le solaire à couches minces, le modèle du capital-risque a souvent été désigné (notamment dans un rapport du MIT) comme peu adapté aux entreprises du secteur. Comparé au entreprises du logiciel et de l’internet, les cleantech nécessitent en effet du temps de développement plus long et comportent des risques importants, notamment technologiques et réglementaires.

 

En 2020, on peut toutefois nuancer ce dernier constat au regard de la maturité croissante des fonds deeptech (souvent inspirés par les confrères des biotech), la convergence entre logiciel et infrastructures, et l’émergence de structures de fonds alternatives, adaptées aux assets lourds, ou capables d’investir sur du temps long. Grands groupes, acteurs publics et philanthropiques sont d’ailleurs idéalement placés pour ce type d’investissements stratégiques. De quoi rester optimiste sur le chapitre à écrire sur la prochaine décennie !

 

Par Benjamin Tincq, co-fondateur et Président de Good Tech Lab

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