Dans ce quatrième épisode, Malika Benamar, responsable organisation des chantiers à la direction technique de l’OPPBTP, l’organisme professionnel de prévention du BTP, analyse les impacts du dérèglement climatique et les risques associés. Elle détaille les actions menées par l’OPPBTP en matière de prévention et d’amélioration des conditions de travail.
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Faire de la prévention un levier de performance des activités du BTP, c’est le mantra de L’OPPBTP, organisme paritaire de prévention de la branche créé en 1947. «Nous conseillons les entreprises du secteur dans l’anticipation des risques auxquels sont exposés leurs salariés. Cela passe par un travail de coordination de tous les acteurs de la filière, organismes professionnels, industriels, maîtrises d’ouvrage, maîtrises d’œuvre, coordonnateurs sécurité et protection de la santé (CSPS)», explique Malika Benamar, spécialiste de la santé, de l’hygiène et des méthodes constructives.
Le défi climatique, qui fait désormais partie des priorités stratégiques de l’OPPBTP, soulève en l’occurrence quatre grands points de vigilance en matière de prévention. L’un, directement lié au climat, porte sur les risques d’intempéries (inondations, grêle, tempêtes) et les épisodes de fortes chaleurs et de canicule. Les trois autres, à savoir l’électrification des chantiers, les travaux de rénovation et les nouveaux matériaux, concernent des effets plus indirects de la transition climatique et énergétique.
La hausse des températures et l’intensification des phénomènes caniculaires affectent directement la santé, la sécurité et la productivité des travailleurs : coups de chaleur, effets du rayonnement ultra-violet, mais aussi fatigue et baisse de la vigilance. En juin 2023, l’OPPBTP a publié un guide pour aider les employeurs à anticiper les dispositions les plus adaptées à la nature des chantiers et des interventions. «Nous y évoquons des solutions très concrètes, comme le port par les salariés d’un bracelet permettant de détecter les coups de chaleur ou encore le recours au WGP, un thermomètre à globe humide mesurant la température, le taux d’humidité, la vitesse du vent et le taux d’ensoleillement direct», note Malika Benamar.
L’ère du tout électrique et les risques associés
Avec l’ère du tout électrique, le risque de travail à proximité de lignes électriques et d’intervention sous tension s’est sensiblement accru. La multiplication des chantiers ayant généré d’importants besoins de recrutement, il s’agit de former les nouveaux salariés, mais aussi les effectifs déjà en place, aux compétences liées à l’électrification. «L’OPPBTP travaille ici avec les entreprises du secteur, pour garantir la qualité des formations et développer des outils adaptés. Nous avons par exemple développé une application mobile permettant, au travers d’un questionnaire à choix multiple, de vérifier le niveau de connaissance et de compétence des salariés», remarque Malika Benamar. L’OPPBTP a également mis à jour un guide dédié à la pose de panneaux photovoltaïques, détaillant les règles d’intervention en fonction des types de toitures et formalisant des préconisations quant à la gestion des interactions entre les différentes familles de prestataires, charpentiers, couvreurs, électriciens.
L’électrification gagne également le parc des engins de chantier, transformant le risque de heurts entre les piétons et les machines. «L’expérience du secteur de l’automobile nous a montré par le passé que la robotisation était potentiellement génératrice d’accidents. Nous suivons avec attention ce sujet, qui nécessitera certainement de nouvelles règles d’exploitation et de maintenance», souligne Malika Benamar. C’est tout l’objet du projet “Stop collision” lancé par l’OPPBTP, conjointement avec les majors des travaux publics, les organisations professionnelles et les principaux loueurs.
Révision des règles d’installation des échafaudages
Autre tendance, autres risques : l’augmentation exponentielle des projets de rénovation énergétique – 500 000 projets annuels selon les prévisions – a mis sur la table les étalons de sécurisation des travaux en hauteur, notamment pour la pose d’isolants. Jusqu’à présent, la plupart des échafaudages de façade étaient installés à plus de 20 centimètres des bâtiments. La direction générale du travail (DGT) s’est penchée sur le sujet. Désormais, les panneaux isolants et rigides sont considérés comme des éléments à part entière du bâti et l’écart entre le plancher d’échafaudage et l’ouvrage doit être inférieur à 20 centimètres.
L’explosion à venir de la construction bois, le développement des bétons bas carbone, des matériaux biosourcés et des isolants thermiques appellent un travail de veille sur les adjuvants et leur tenue dans la durée. Des recherches sur les propriétés chimiques de la mousse polyuréthane projetée, de plus en plus fréquemment utilisé dans la rénovation, sont à l’ordre du jour. La question du recyclage et des modalités de gestion des déchets de chantier va également gagner en importance. De manière plus globale, le changement des modes constructifs questionne inévitablement les cadres et les modalités de prévention.
La prise en compte des effets du changement climatique est une occasion de travailler sur l’amélioration des conditions de travail. Mais celle-ci est suspendue à trois prérequis : anticiper, identifier les risques émergents et faire de la prévention intégrée.
Dans ce podcast nous avons donné la parole à des experts qui apportent un éclairage nouveau sur un sujet que le groupe de travail de prospective, piloté par Leonard à l’initiative de VINCI, explore dans le rapport « Santé, sécurité et prévention : risques émergents dans les métiers de la construction et de la gestion d’infrastructures » → Découvrir le rapport