Les Solutions fondées sur la Nature, source d’inspiration pour l’adaptation climatique

Renaturation des rues, végétalisation des bâtiments, perméabilisation des sols, diversification des cultures agricoles et des essences forestières… De plus en plus présentes dans les stratégies de lutte contre le réchauffement climatique, les Solutions fondées sur la Nature, ou SfN, s’avèrent particulièrement efficaces et rentables. Comment accélérer leur développement ? Quels freins lever ? Quels acteurs mobiliser ? Autant de questions débattues lors de l’événement organisé le 1er octobre par Leonard sur le thème : “Solutions fondées sur la Nature : quelles promesses pour l’adaptation au changement climatique ?”.

Autour de la table : Florence Lavissière, responsable  Écosystèmes au sein de l’International Union for Conservation of Nature (IUCN), Bertrand Degrieck, technicien de rivières au Syndicat mixte des basses vallées Angevines et de la Romme (Lauréat du projet « trophées du génie écologique » 2022 et du projet Life Artisan), Martine Hossaert, directrice de recherche émérite au CNRS, co-directrice du programme SOLUBIOD (programme de recherche France 2030 sur les Solutions Fondées sur la Nature), Ariane Kaploun, spécialiste des Solutions Fondées sur la Nature chez AXA Climate, Pierre Grasset, responsable technique Equo Vivo, Délégation Terrassement, Travaux Maritimes et Fluviaux de VINCI Construction et Isabelle Spiegel, directrice de l’environnement du Groupe VINCI. 

SfN. Trois lettres qui reviennent de plus en plus souvent parmi les experts de la biodiversité. SfN, pour Solutions fondées sur la Nature, un concept posé en 2009 par l’International Union for Conservation of Nature (IUCN), organisation fédérant aujourd’hui 208 États, des organisations de la société civile, des experts et des ONG. Si au fil des années cette notion a connu des évolutions, sa définition repose sur un socle invariant de critères. « Les SfN désignent des actions visant à protéger, gérer de manière durable et restaurer des écosystèmes naturels ou modifiés pour relever directement les défis de société de manière efficace et adaptative, tout en assurant le bien-être humain et en produisant des bénéfices pour la biodiversité », résume Florence Lavissière, responsable Écosystèmes au sein de l’IUCN. 

Événement Solutions fondées sur la Nature
Dans l’ordre : Valentine Huet, Bertrand Degrieck, Martine Hossaert, Pierre Grasset et Ariane Kaploun

Création de parcs urbains inondables pour protéger les infrastructures des inondations, restauration de dunes pour réduire l’érosion côtière, multiplications d’îlots de fraicheur urbains favorables à la biodiversité… Ou encore renaturation des rivières. « Nombre de cours d’eau ont subi l’impact des activités anthropiques : recalibrage, approfondissement et cloisonnement des écoulements (barrages et seuils). Il en résulte une déconnexion des cours à leur lit majeur, génératrice d’assèchements en été et d’écoulements lors des précipitations », souligne Bertrand Degrieck, technicien de rivières au Syndicat mixte des basses vallées Angevines et de la Romme (SMBVAR). 

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La coopération au cœur du succès des SfN

Pour les intervenants, les SfN ne pourront se développer de manière rapide et massive sans la concertation de toutes les parties prenantes. C’est dans cette logique de coopération qu’ont été constitués onze Living labs au sein du programme de recherche SOLU-BIOD sur les SfN du CNRS.

« Nous adoptons une posture de sciences participatives, en mettant autour de la table des académiques, des nonacadémiques, des élus, des gens de terrain. Et ce, jusquaux phases de maturation des projets », explique Martine Hossaert, directrice de recherche émérite au CNRS, co-directrice du programme.  

La concertation dans la durée constitue en effet un prérequis à la réussite des SfN. Equo Vivo a par exemple intégré dans sa démarche un impératif de suivi allant au-delà du cadre contractuel des marchés sur lesquels se positionne VINCI Construction Terrassement.

« Aujourd’hui il est difficile de quantifier réellement l’impact durable de nos chantiers. C’est en assurant ce suivi et en passant par le dialogue et la concertation que l’on assure notre propre formation et que l’on tire des leçons des actions menées », argumente Pierre Grasset, responsable technique d’Equo Vivo. 

Les gouvernements assurent 83% des flux de financement des SFN  

La pertinence des SfN renvoie donc aussi à l’innovation inhérente aux approches, aux méthodes et aux modèles qu’elles inspirent. « On ne peut pas “penser SfN” sur un ou deux ans, ces solutions engagent sur le long terme et appellent des expertises et des outils de modélisation. Nous parlons d’enjeux climatiques, mais aussi d’enjeux sociétaux. Et avec la modélisation sociétale, c’est un nouveau pan de de la recherche en sciences sociales qui s’ouvre à nous », remarque Martine Hossaert. 

Face à l’urgence écologique, la dimension écosystémique des SfN appelle en outre une accélération des dynamiques de financement. Aux échelons locaux, les collectivités territoriales et leurs émanations jouent un rôle déterminant. « Le fait d’inscrire une action de renaturation dans un projet de territoire sur six ans nous permet de bénéficier de 80% de subventions : 50% de la part de l’Agence de l’eau Loire-Bretagne et 30% de la Région Pays de la Loire. Le reste à charge de 20% échoit aux quatre intercommunalités qui portent le Syndicat mixte des basses vallées Angevines et de la Romme (SMBVAR) », explique Bertrand Degrieck. 

Aujourd’hui, les gouvernements fournissent 83% des flux de financement pour les solutions fondées sur la nature. « Les investissements nécessaires à horizon 2030 sont estimés à 484 milliards de dollars par an. Il faut donc que le secteur privé investisse davantage dans les SfN », insiste Ariane Kaploun, spécialiste des Solutions fondées sur la Nature chez AXA Climate 

Ouvrir le champ de la concertation, mettre en œuvre de nouveaux véhicules de financement et d’assurance, donc. Mais avant tout, agir. Selon le rapport Stern de 2006, le premier à évaluer l’impact économique des effets du dérèglement climatique, le coût de l’inaction, c’est-à-dire de la réparation des dommages, surpasse de loin celui de la prévention : 5 % à 20 % du PIB mondial, contre 1 %.

« Il va falloir aller beaucoup plus loin sur le sujet de la science du vivant, en avançant ensemble. Grâce aux Solutions fondées sur la Nature, on peut très clairement se positionner plus fortement sur le “faire du bien” et plus seulement sur le “faire moins de mal” », revendique Isabelle Spiegel, directrice de l’environnement du groupe VINCI.  

 

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