Le béton fait souvent figure de coupable idéal des abus de l’urbanisation et de l’aménagement du territoire. La réalité de ce matériau incontournable sur les chantiers est plus complexe, et le béton demeure une ressource inégalée au service de l’imagination des architectes et de la performance des constructions. Par ses propriétés structurelles et sa bonne inertie thermique, le béton reste aussi un matériau essentiel à l’écoconception des bâtiments, dont le principe repose sur le recours des matériaux de construction au bon endroit pour exploiter au mieux leurs propriétés. Louis Vicat, inventeur du ciment artificiel, faisait déjà dire à Balzac en 1839 qu’il « a fait faire le seul progrès réel à la science pratique des constructions ». Résistant, durable et versatile, il reste l’une des clés de l’édification de la ville de demain. À ce titre, il fait l’objet d’efforts d’innovation importants, principalement en matière d’impact environnemental et d’usages. Constructeurs, cimentiers, startups : toute la filière s’implique pour réenchanter le béton.
Répondre à l’impératif environnemental
La production de béton représente 4 milliards de tonnes par an à l’échelle mondiale. Le ciment, l’élément le plus émissif du béton, est entre autres responsable de 5 à 6% des émissions globales de CO2… La réduction de son empreinte carbone est ainsi devenue une priorité. L’industrie cimentière ambitionne de diviser son empreinte par cinq d’ici 2050. Pour y parvenir, plusieurs grands axes émergent : nouvelles formules, captage du CO2, combustibles alternatifs et recyclage de déchets issus de la démolition sont au programme. En Vendée, l’usine Hoffmann Green Cement Technologies se présente comme la première cimenterie verte de France. Ici, on produit du ciment sans clinker, dont la production demande d’importantes quantités d’énergie. Le projet national FastCarb ambitionne quant à lui de développer la carbonatation accélérée des granulats de béton recyclé, ce qui aurait la conséquence double de favoriser le recyclage tout en diminuant l’impact en CO2 du béton !
Une innovation béton
Au-delà de l’environnement, l’innovation touche tous les aspects de la vie du matériau. Dans le cadre du Cement Lab, de nombreuses startups ont fait la démonstration du dynamisme de la filière. Basilisk, une jeune entreprise née aux Pays-Bas, a mis au point un béton auto-cicatrisant. Ce dernier s’appuie sur des micro-organismes capables de produire du calcaire et donc de réparer les fissures en toute autonomie ! Disruptive Technologies, startup norvégienne, s’appuie sur une solution de capteurs afin de surveiller les données essentielles telles que la température ou les changements capacitifs… Dataswati s’appuie sur les données et l’intelligence artificielle pour optimiser les processus de production complexes. Dans le domaine du ciment, cela permet d’anticiper la qualité du matériau en cours de production, et également d’optimiser les différentes étapes, de l’utilisation du combustible au broyage du clinker.
Cap sur les nouveaux usages
Enfin, le béton se réinvente pour imaginer de nouveaux usages. Le pavé parisien propose déjà des enceintes en béton. La wasterial, inventé par EtNISI et issu de produits recyclés, propose toutes sortes de variations esthétiques pour revêtements de sols ou de murs. Le béton fibré à ultra-haute performance, rendu célèbre par le MuCEM, invite architectes et constructeurs à plus de créativité. Plus discuté, le béton s’invite également dans l’impression 3D et participe à de nouveaux procédés de construction : Concreative imprime ainsi du mobilier en béton sur demande. Avec Viliaprint, cinq maisons destinées au logement social seront ainsi imprimées à Reims.
Translucide, connecté, luminescent, le béton n’a pas fini de se réinventer.